NATIONALITE(S) EN QUESTION

Débat animé par Michèle Riot-Sacy avec la participation de Gérard Noiriel, Hans Ulrich Jost, Peter Sahlins et Patrick Weil.

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Compte-rendu réalisé par Michel SOUVIGNY
Samedi 19 octobre 2002

G. Noiriel :

La question de la nationalité est au carrefour de deux types d’enjeu :

P. Sahlins :

La notion de nationalité remonte au début du XIXème s.

Y avait-il des Français avant 1789 ?

Officiellement, il n’y avait que des sujets.

En fait, on faisait la distinction entre Français et étrangers dès le XIVème s. : on opposait les aubains (« nés ailleurs ») aux régnicoles.

Le national est défini a contrario, à l’inverse de l’étranger.

L’étranger ne peut tenir bénéfice ni faire testament ni hériter, d’où le droit d’aubaine : le bien de l’étranger reviennent au roi à sa mort. Ce droit d’aubaine ne sera aboli que quelques années avant la révolution.

H. U. Jost :

La Suisse est un pays qui n’a pas de nation : il existe une chaire d’Histoire nationale à Genève, qui n’enseigne que l’histoire genevoise !

La nation est une notion très française, inapplicable à l’histoire de la Savoie, de l’Allemagne, de l’Autriche, etc.

La nation n’est pas une valeur, elle véhicule des système de valeurs : ex : le militarisme.

En 1866, année où la Prusse commençait à accomplir l’unité allemande, un journal suisse écrivait :

« La nation n’est pas un but en soi, mais le tremplin pour acquérir les libertés politiques, puis disparaître après. »

C’est me contraire qui s’est produit.

La nation s’est trahi au moment même où elle se créait en excluant les femmes, puis elle est devenu une machine d’exclusion.

Ex : dans la Mitteleuropa, où la nation a été « squattée » par quelques familles.

On note cependant quelques aspects positifs au plan de l’économie : mise en place d’éléments qui favoriseront un développement plus rapide.

Ex : le franc suisse.

La nation est un concept ambiguë.

P.Weil :

Que dire du concept de nationalité ?

L’idée de nation est un concept flou. On essaie de le définir grâce à certains autres concepts :

·                   le droit du sol (Allemagne)

·                   le droit du sang (France) : conception ethnique.

C’est la France qui invente le droit  du sang comme technique d’attribution de la nationalité (Code Civil-1803)

2ème étape : le retour du droit du sol, fin XIXème s., pour imposer la nationalité à des enfants et petits-enfants d’étrangers, pour imposer le service militaire, et par peur de perdre l’Algérie, face à une forte immigration italienne et espagnole.

3ème étape : l’ouverture à la nationalité à vocation démographique : »faire » 100.000 Français par an (1927), technique indépendante de la citoyenneté.

Après la loi de 1927, volonté d’imposer une lecture raciale, ce qui est à l’origine de 3 crises :

·                   sous Vichy

·                   à la Libération où certains veulent imposer des quotas

·                   la période contemporaine : en 1977, Giscard veut renvoyer les Algériens.

On remet ainsi en cause le droit du sol, ce que n’avait pas fait Vichy

G.Noiriel ajoute qu’en effet, la mise en place d’une intégration entraîne toujours une exclusion.

P.Sahlins :

Ceux qui se font naturaliser sous l’Ancien Régime sont des gens qui font avancer la France : marchands, professions libérales, clergé, secteur tertiaire de Paris, des ports, de la vallée du Rhône, des frontières…

Ils viennent de partout (ex : de Chine) mais surtout des frontières.

De plus la France est une terre de refuge pour les catholiques, et elle recrute des protestants riches et de talent.

H.U. Jost :

Il ne faut pas oublier l’incidence sociale de la notion de nation : au début, l’idée de nation est liée à la mobilisation des masses. Dans certaines régions, cette idée n’a pas joué (ex : en Italie: seul le système de Mussolini a fait de l’Italie une nation, ce qui n’est pas positif.

Un débat, impossible à prendre en notes, oppose ensuite P. Weil et G. Noiriel.

Michel SOUVIGNY

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