Ordonner ou convaincre ?
L’évolution des rapports entre les autorités politiques et les Français dans le domaine de la transmission des informations et des idées dans la seconde moitié du XVIII^ème siècle.

   Etudier la manière dont les informations étaient transmises dans le royaume de France au cours de la seconde moitié du XVIII^ème siècle conduit à se poser deux questions en rapport avec l’opinion, thème central des Rendez-vous de l’Histoire 2007 : comment la manière de transmettre les informations a-t-elle évoluée ? En quoi ces évolutions sont-elles le reflet de l’émergence d’une opinion publique ?

   A travers deux exemples tourangeaux puisés dans les Archives départementales d’Indre-et-Loire, l’un en 1749/1752, le second en 1792, on peut aisément percevoir les évolutions qui ont marqué notre pays au cours de ces 40 années marquées par l’émergence des nouvelles idées des Lumières puis par la remise en cause de l’absolutisme royal à partir de 1789. D’une information descendante assénée depuis Versailles puis diffusée aux quatre coins de la ville pour que les Tourangeaux en prennent connaissance, on passe à une démarche pédagogique et festive, fondée sur l’idée simple qu’il vaut mieux convaincre et éduquer que contraindre.

  En 1749, en plein cœur du règne de Louis XV, le contenu de lettres patentes concernant les compagnons et ouvriers travaillant dans les fabriques et les manufactures du royaume est diffusé à Tours par l’intermédiaire d’un huissier de justice qui, assisté d’un tambour, en proclame les différents aspects à la population locale. Trois années plus tard, les lettres se retrouvent incorporées à un registre de l’ensemble des règlements concernant le commerce des draps de Tours. La couverture du recueil est ornée d’une figure combinant le blason de la ville (les 3 tours) et les symboles de la monarchie, fleurs de lys et lettre L majuscule. Le consentement de la population est implicitement acquis.

    En 1792, la plantation d’un arbre de la liberté au cœur de la même cité tourangelle illustre bien les transformations opérées au cours des décennies qui précèdent cet évènement. C’est un acte symbolique dont l’objectif est de séduire le plus grand nombre en suscitant le rêve et la douceur des sentiments. En ce mois de juin 1792, le contexte intérieur et extérieur se fait pourtant de plus en plus menaçant : le monarque constitutionnel abuse de son droit de veto, notamment pour défendre les prêtres réfractaires contre les lois votées par l’Assemblée législative. Quant à l’engagement militaire consécutif à la déclaration de guerre " au roi de Bohême et de Hongrie " en avril, il tourne au fiasco. Le roi use à nouveau de son droit de veto pour interdire l’établissement d’une garnison de 20000 fédérés sous les murs de la capitale afin de défendre celle-ci. Le recours à la force des armes pour défendre la Liberté évoqué dans le texte n’est donc pas un vain mot. En réalité, le régime est à l’agonie : l’affiche est publiée une semaine exactement avant l’envahissement des Tuileries par les sans-culottes parisiens, le 20 juin 1792 : C’est au cours de cette première " journée révolutionnaire " que Louis XVI coiffé d’un bonnet rouge boit " à la santé du peuple ". Ainsi, en dépit de la naïveté de certains propos, confirmée par l’Ode prononcée par Athanase Veau-Delaunay, futur député à la Convention, le jour même de la plantation, ce sont bien les sentiments autant que la raison qui sont visés par cette entreprise de persuasion des Tourangeaux. Mais n’est-ce pas exactement à la croisée de ces deux penchants humains que se situe l’opinion ?

Selon le niveau d’enseignement envisagé, classe de 4^ème en collège ou de seconde en lycée, nous avons voulu proposer deux types de questionnaires qui sont bien sûr adaptables dans le contexte plus globale d’une sensibilisation des élèves à la notion d’opinion publique, thème également abordé dans le cadre de l’éducation civique ou de l’ECJS.