"Du déluge au réchauffement de la Terre : les catastrophes naturelles" animé par Bernard Vincent avec Jean Andreau (Antiquité), Jacques Berlioz (Moyen Age), Anne-Marie Granet-Abisset (Contemporaine) et Alain Musset (Géographe et Historien spécialiste de l'Amérique latine) |
Compte-rendu
réalisé par
Bruno Granger
L'histoire des catastrophes naturelles est récente
contrairement à celle des maladies et représente un immense champ
d'investigation pour les étudiants (les catastrophes naturelles ont d'abord
intéressé les Sciences Naturelles). Tous les événements néfastes ne sont pas des
catastrophes, pour cela il faut des victimes. Un séisme dans le Sahara n'est pas
une catastrophe contrairement à un autre à Mexico. Toutes les catastrophes
naturelles sont brutales, violentes, inattendues et limitées dans le temps.
La première question qui se pose est celle du documents à notre disposition.
Dans l'Antiquité on trouve beaucoup de témoignages car ces événements sont liés
à la vie de la cité, il y a aussi les inscriptions votives et des fouilles comme
à Pompéi où l'éruption de 79 à figé les vestiges du séisme de 61. Pour le Moyen
Age on trouve des documents économiques sur les reconstructions et des sources
narratives surtout ecclésiastiques (l'Église attire l'attention sur les signes
divins). Pour les périodes plus récentes, les sources sont plus nombreuses, il
ne faut pas oublier la mémoire des habitants des lieux qui est un document peu
exploité.
Il est intéressant de se poser la question de savoir comment les hommes
interprètent la catastrophe. Ainsi au Salvador, 2 mois après la catastrophe du
16/02/01, un sondage mettait en lumière que 38% de la population considérait
qu'il s'agissait d'un châtiment divin (51% pour les plus pauvres et 14% pour les
plus instruits). Il y avait seulement deux réponses possibles : châtiment divin
ou catastrophe naturelle, on n'évoquait pas la responsabilité humaine.
Seconde question : qui est responsable ? Dans l'Antiquité, cette question ne se
pose pas. Seule compte la réponse à la question comment rétablir le pacte avec
les dieux. Le naturel et le divin ne sont pas contradictoires, mais le second
est le plus important. Au Moyen Age, la Bible sert de prisme et ce sont les
clercs qui expliquent qu'il s'agit d'une faute. En 1248, l'effondrement du Mont
Granier près de Grenoble qui fit 1000 victimes a une cause divine expliquée par
l'évêque. En 1687 à la suite d'un séisme à Lima, la 1ère mesure prise par le
vice-roi est d'ordonner aux femmes de rallonger leurs jupes ! Dans un autre cas,
on fait creuser des trous dans les jardins, car on pense que les séismes sont
dus à des vibrations de l'air emmagasiné sous terre dans des galeries et qui
n'arrive pas à ressortir. Il est intéressant de noter au passage que la
catastrophe peut renforcer le pouvoir du Prince. A l'époque contemporaine,
l'Administration prend la place de l'Église .
Comment les hommes réagissent-ils ? Jusqu'à ce que nous instaurions la notion de
risque zéro, la population après une période de mesures d'urgence, de
solidarité, d'accablement... assume. L'instinct de survie fait que l'on
reconstruit. Ainsi 40 ans après la catastrophe, le Mont Granier est reconquit
par la viticulture. On prend aussi des mesures exceptionnelles. Après la peste
sous Marc-Aurèle, on embauche pour la première fois des Barbares, des esclaves
et des gladiateurs dans l'armée romaine. On remarque aussi que les consignes de
précaution ne sont pas respectées longtemps. Une évolution récente (depuis le
XIX ème) consiste à demander de l'aide à l'administration que l'on accuse par
ailleurs d'avoir accentué le problème. Les catastrophes naturelles peuvent avoir
des conséquences positives. Ainsi après l'incendie de Rome sous Néron en 64, la
ville est rénovée. De même pour Lisbonne après le séisme de 1765. Une inondation
catastrophique dans le Queyras en 1957 sera l'occasion de construire des
équipements permettant le début du tourisme. A noter qu'il y a peu de zones sans
risques, mais que l'homme accepte un niveau plus ou moins grand de risque.
Pour conclure disons que le travail de l'historien qui dresse la liste des
catastrophes est utile, car son analyse permet avec l'aide d'autres
scientifiques, d'aider les décideurs. Il permet aussi de comprendre les rapports
de l'homme avec la nature.
Bruno Granger
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